En Côte d’Ivoire, deux forces politiques aux profils marqués et spécifiques se dégagent de la dynamique des affrontements résultant de la guerre de succession et de la précocité de la campagne électorale qui s’en est suivie.
En Côte d’Ivoire, deux forces politiques aux profils marqués et spécifiques se dégagent de la dynamique des affrontements résultant de la guerre de succession et de la précocité de la campagne électorale qui s’en est suivie.
L'éducation a pour fonction première la formation d'individus autonomes capables de s'éclairer par leur propre raison, de construire leur histoire personnelle et leur projet de vie en s'aidant de leur propre entendement. Le but principal de l'éducation moderne est de briser le régime des tutelles. Il est de construire et de libérer l'individu.
Au-delà de sa signification littérale économique, la thématique du 5ème Sommet UA-UE doit être aussi entendue dans sa signification symbolique. Elle en appelle à une transformation qualitative volontariste de nos corps politiques et à un changement social de fond. Ce changement qualitatif est requis par les évolutions internes et externes de notre environnement économique, social et politique. La jeunesse symbolise la vitalité, le dynamisme, l’énergie créatrice, l’inventivité, l’innovation, le renouveau, la durabilité. Elle s’oppose à la vieillesse qui évoque, au contraire le passé, la sclérose, la faiblesse, l’inefficience, l’obsolescence, la dégénérescence et la mort.
En appeler à investir dans la jeunesse pour un avenir durable, c’est en appeler symboliquement à revitaliser le présent, et à initier un nouveau commencement historique ; c’est demander de révoquer les structures et les logiques du passé pour initier un nouveau départ historique en matière de représentation du politique, de l’économique et du social ;
Transformer l’économie de marché en développement endogène par la médiation de la démocratie afin d’offrir des perspectives à la jeunesse en termes d’émancipation personnelle et d’emplois de qualité, telle est la problématique fondamentale du XXIème siècle en Afrique. Internationalement reconnue pour l’efficience de sa politique économique et pour sa gouvernance démocratique, la Côte d’Ivoire a été choisie pour abriter le 5ième Sommet Union Africaine-Union Européenne. Ce choix apparaît comme un symbole fort. Où redonner en terre Africaine un nouveau souffle aux rapports de coopération des deux ensembles économiques et politiques que sont l’UA et L’UE ? N’est-ce pas dans l’un des pays d’Afrique Noire où se donne à voir l’alliance de l’économie de marché et de la démocratie, en laquelle réside le plus grand potentiel de d’intégration sociale et de développement économique inclusif ?
La problématique du chômage massif des jeunes en Afrique et de la reconstruction de leur espérance est politique. Elle ne sera résolue que si nous parvenons à transformer l’économie de marché en développement par la médiation de la démocratie représentative.
Le partenariat entre l’UA et l’UE devrait consister à articuler l’économie de marché avec la démocratie, de telle sorte que puisse être résolue la problématique fondamentale de l’intégration des acteurs économiques et des acteurs sociaux, de l’harmonisation de leurs logiques et de leurs intérêts divergents.
Avant de démontrer de manière argumentative que la reconstruction d’une appartenance nationale citoyenne, composante de base de la démocratie et condition du développement endogène, doit être prioritaire en Côte d’Ivoire, il importe de souligner l’unicité de la démocratie. « Il n’y a pas de démocratie blanche ou noire, chrétienne ou islamique ; toute démocratie place au-dessus des catégories « naturelles » de la vie sociale la liberté du choix politique. C’est le sens ultime de la définition même de la démocratie: le libre choix des gouvernants par les gouvernés » dit Alain Touraine. Les appels récurrents au rejet d’une démocratie dite « occidentale » au profit d’une démocratie spécifiquement africaine sont clairement motivés par la volonté des groupes dominants de maintenir, au détriment du plus grand nombre, les privilèges garantis par les régimes d’oppression et de tutelle.
La démocratie libérale est faite pour redistribuer les fruits de la croissance, redistribution nécessaire qu'appelle l'impératif économique d'investissement et d'accumulation des ressources. Comme nous le montre Alexis de Tocqueville, le projet politique ultime qui anime la démocratie est de réaliser l'égalité de condition des citoyens, d'assurer de manière tangible à tous les membres de la cité une dignité des conditions de vie. Les trois dimensions de la démocratie libérale, la citoyenneté, la représentation politique des intérêts sociaux, la limitation du pouvoir par les droits de l’homme, ont une finalité sociale et concourent à réaliser ce projet.
L’importance du débat démocratique public dans la problématique du développement est une question fondamentale dans nos jeunes démocraties africaines confrontées à l’urgence de la modernisation économique. Relativement à cette fin qui semble plutôt en appeler à l’action efficace qu’à la parole, discussions et controverses ne sont-elles pas une perte de temps ? Le bon sens ne conseille-t-il pas de s’en remettre au savoir-faire et à l’expertise d’un gouvernement de technocrates plus qualifiés pour mener à bon port le train du développement dans une économie mondialisée et complexe ? Au lieu d’impliquer le peuple, le débat démocratique ne doit-il pas se limiter aux querelles des experts et aux controverses des scientifiques du développement ? Ne faut-il pas suivre Joseph Schumpeter lorsqu’il définit la démocratie comme libre choix d’une équipe de gouvernement d’experts chargés de décider pour le peuple et de trouver des solutions rationnelles à ses problèmes ?
En nos démocraties en construction, les revendications sociales dégénèrent souvent en conflit politique, en contestation du régime et finissent par se transformer en guerre civile. Il en est ainsi parce que l’unité nationale citoyenne reste à bâtir. La culture du conflit démocratique comme affrontement institutionnel légitime des intérêts particuliers divergents, des idées et des valeurs contradictoires, n’est pas encore complètement intégrée par toutes les parties prenantes du contrat social. Il s’ensuit que la multiplication des mouvements sociaux est interprétée comme indice de la crise du régime politique, de la remise en question de la légitimité du gouvernement. La prolifération des revendications catégorielles est interprétée comme une contestation populaire du pouvoir politique. Le mouvement social est alors considéré comme une arme politique dans la lutte pour le pouvoir et non pas comme une institution du conflit démocratique, par laquelle les organisations de la société civile défendent leurs intérêts catégoriels et revendiquent des droits dans le cadre du régime. Cette déficience culturelle et politique favorise l’instrumentalisation des mouvements sociaux par des mouvements politiques insurrectionnels qui cherchent à renverser, par la violence, le gouvernement élu pour s’emparer du pouvoir.
L’émergence résulte de la gestion démocratique du changement social dans l’économie de marché.
La démocratie donne au système politique « un rôle de médiation entre les acteurs sociaux et entre ceux-ci et l’Etat qui maintient ensemble les composantes du développement » écrit Alain Touraine. C’est en ce sens qu’elle est la condition du développement endogène car cet état positif de la société globale procède de la « gestion politique des tensions entre l’investissement économique et la participation sociale ». Le développement n’est pas un état matériel. C’est « un ensemble de rapports sociaux en même temps qu’une politique économique ». « Il n’y a pas de développement sans gestion ouverte des tensions entre investissement et répartition » des fruits de la croissance. Le développement endogène est une émergence au sens où le dynamisme économique produit l’élévation du niveau de vie de la population grâce à la médiation du système politique démocratique, acteur du compromis social. L’émergence définit une transformation qualitative de la société globale. Elle est marquée par la solidarité sociale.
En démocratie, les mouvements sociaux ne visent pas à renverser le régime politique.
En démocratie libérale, les mouvements sociaux ne visent pas à renverser l’Etat pour transformer son régime politique. De nature essentiellement revendicatrice, ils sont économiquement et socialement motivés. Les acteurs sociaux et les acteurs économiques manifestent en démocratie pour revendiquer des droits et pour défendre des intérêts légitimes. Les manifestations poussent l’Etat à répondre aux demandes des acteurs de la société civile afin de satisfaire l’impératif démocratique d’inclusion et d’intégration de la diversité. Dans les cas extrêmes, lorsque la démocratie est menacée par une mauvaise gouvernance, Impeachment et destitution constitutionnelle du chef de l’Etat, hors de la période de l’Election, visent à empêcher la privatisation de l’intérêt général par le pouvoir politique et à rétablir dans l’Etat la priorité du service du Bien public.
Dans les démocraties de parti unique ou de parti dominant, le libéralisme économique, n’avait pas dans la plupart des cas, réussi à promouvoir le développement, à créer une nation, à réaliser l’inclusion sociale et l’intégration économique de la cité parce que ces régimes politiques étaient fondés sur la négation de l’égalité, de la liberté et de la créativité individuelle et collective. Tout laisse donc à penser que le mercantilisme institué des démocraties procédurales ne produit donc pas le développement endogène parce qu’il limite les échanges à l’oligarchie, à la différence du libéralisme économique réel. Il tue la concurrence, donc la créativité et l’émergence des talents, parce qu’il est fondé sur le monopole qu’Adam Smith condamne, et qu’il tend à ne promouvoir que les intérêts des plus forts et des groupes dominants.
En Afrique Noire, le temps est à l’élection au suffrage universel des despotes en qualité de garants sécuritaires du nouvel ordre économique et géostratégique. L’épouvantail djihado- terroriste s’est substitué à l’épouvantail de la révolution communiste qui fit les beaux jours des despotes africains du temps de la guerre froide. L’élection au suffrage universel des despotes africains soulève donc de graves interrogations.
Après un quart de siècle, un bilan contrasté se dégage de l’expérience démocratique en Afrique Noire. La vigueur de la demande démocratique des peuples et les transitions démocratiques réussies en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, ne font pas oublier la résistance des autocraties qui tendent à se perpétuer au moyen des coups d’Etat constitutionnels. Dans la plupart des pays d’Afrique Noire, la politique démocratique a été réduite à l’affrontement entre les élites pour l’appropriation du pouvoir et on a demandé à l’économie de marché de résoudre par elle-même les problèmes de la pauvreté, de l’inégalité et de l’exclusion sociale que son darwinisme interne contribue pourtant à aggraver.
La dérégulation de l’économie et la croissance n’ont donc pas permis de résorber la grande pauvreté et de réduire les inégalités. On a plutôt assisté à une progression concomitante de la croissance économique, de la grande pauvreté, du creusement des inégalités, de l’exclusion sociale et politique. Cette dualisation accrue des sociétés d’Afrique Noire se traduit par le développement du risque terroriste, du nationalisme ethnique et confessionnel, de la guerre civile et du sécessionnisme. Ce déficit social et politique met donc en évidence les limites intrinsèques d’une démocratie qui s’est mise à la remorque de l’économie dérégulée de marché en abdiquant de son rôle politique spécifique.