Récemment publiées dans un journal numérique ivoirien, les leçons que Franklin Nyamsi prétend retirer de la crise politique Zimbabwéenne n’en sont pas. Ces fausses leçons ressassent les obsessions personnelles avec lesquelles il a failli incendier la côte d’Ivoire. Son interprétation de la crise politique zimbabwéenne est brodée avec les notions centrales de sa vision du monde anti-démocratique : la légitimité historique, l’adoubement par le chef, la transition générationnelle conduite par un leader générationnel.
Le prisme déformant de la légitimité historique et de l’adoubement
La crise Zimbabwéenne enseignerait, selon Franklin Nyamsi, qu’Emmerson Mnangagwa a triomphé de ses concurrents en raison de sa légitimité historique. Son statut de compagnon de route, d’homme de confiance et de sécurocrate impitoyable auquel le régime doit sa survie, l’aurait qualifié pour la direction de l’Etat en tant que successeur naturel du vieux chef par lequel il a été adoubé. Détenteur de cette légitimité historique, Emmerson Mnangagwa serait, après Robert Mugabe, le premier ayant-droit légitime du pouvoir Zimbabwéen sur la liste des prétendants. La disgrâce finale de Grace Mugabe sanctionnerait politiquement l’imposture consistant à récuser cette légitimité historique. Dans l’impensé informulé de Franklin Nyamsi, Grace Mugabe et ses supporters sont, en quelque sorte, les analogues zimbabwéens des acteurs politiques ivoiriens qui contestent la légitimité historique de Guillaume Soro au RDR.
Franklin Nyamsi raisonne selon une logique patrimonialiste. Conformément à cette logique de la légitimité historique, chère au conseiller spécial de Guillaume Soro, le successeur de Mugabe devrait aussi adouber par dévolution monarchique et par légitimité historique, un leader de la jeunesse de la Zanu-PF lors de la prochaine élection présidentielle. Réclamée par le peuple, l’élection du nouveau dirigeant de l’Etat Zimbabwéen par le suffrage universel est donc caduque par principe.
Muni de sa grille de lecture patrimonialiste formatée selon le principe de la légitimité historique, il semblerait que Franklin Nyamsi, qui récuse le principe de l’élection, se fasse l’avocat d’un Emmerson Mnangagwa historiquement légitime, si ce dernier s’avisait de repousser les élections pour confisquer le pouvoir, ou même s’il refusait de céder le pouvoir après avoir perdu l’élection présidentielle prévue.
Le prisme déformant de la transition générationnelle
Dans l’optique de Franklin Nyamsi, Emmerson Mnangagwa n’a pas été seulement adoubé par Robert Mugabe, il est aussi plébiscité par un peuple enthousiaste avide de changement générationnel. Il est l’homme providentiel qui vient de consacrer le besoin populaire de transition générationnelle contre un vieux libérateur, un représentant de la gérontocratie qui doit céder la place à une nouvelle génération. Muni de sa légitimité historique, qui suffit à le qualifier pour la direction du pays après Robert Mugabe, il est en droit de prendre le temps qu’il faut pour conduire le développement économique. Cette légitimité historique fonde son crédit politique en dépit du bilan calamiteux de la gouvernance Mugabe dont il fut un acteur central.
Franklin Nyamsi voit dans la crise politique Zimbabwéenne la validation historique de sa vision du monde surannée et dangereuse : l'alternance politique par légitimité historique, l’adoubement d’un leader générationnel par le chef et la transition générationnelle. Franklin Nyamsi utilise les évènements du Zimbabwe pour légitimer et consacrer sa conception mortifère de l'alternance politique. Il plaque, sur le Zimbabwe en transition démocratique, la grille de lecture dangereuse de la légitimité historique et de l’adoubement avec laquelle il a failli mettre à feu la Côte d’Ivoire.
Le conseiller spécial du Président de l’Assemblée Nationale ivoirienne ne sait manifestement pas que l’Afrique est sortie de l’ère des révolutions, des mouvements de libération et de leur mode de légitimation. Il ne sait pas que la nouvelle Afrique est sortie du siècle des autocraties et de la légitimité historique pour entrer dans celui de la démocratie et de la légitimité démocratique, fondées sur l’élection et le suffrage universel. Ignorant les transformations internes profondes du régime démocratique, il ne sait pas que cette légitimité démocratique s’est affinée pour rapprocher le pouvoir politique au plus près des besoins et des demandes de la société. Il ignore manifestement qu’il ne suffit plus d’être élu pour être légitime, et que l’élu doit, dans le modèle démocratique des temps nouveaux, conquérir quotidiennement sa légitimité à travers une gestion scrupuleuse du Bien commun et une administration rigoureuse de l’intérêt général. Sait-il seulement que la légitimité démocratique s’est pour cela pluralisée ? Sait-il que la légitimité électorale est insuffisante ? Sait-il que l’on parle maintenant de légitimité d’impartialité, de légitimité de réflexivité, de légitimité de proximité et d’interaction ? Sait-il que la légitimité historique relève d’une ère historique révolue et qu’elle est devenue désormais sans objet depuis les années 1980 ?
Le chèque en blanc qu’il attribue à Emmerson Mnangwawa, en le célébrant à la manière de son mentor Ivoirien, prouve que Franklin Nyamsi ignore tout des changements historiques qui se sont produits en Afrique et des transformations internes du régime démocratique. Ses grilles de lectures politiques sont obsolètes et datent du Moyen Age, comme le prouve sa prestation ridicule devant la statue de l’empereur Guillaume II de Normandie, aux côtés de son mentor ivoirien. Ecrites avec le style de sa jactance habituelle, ses « analyses » confuses sentent toujours le soufre. Pour le plus grand malheur de l’homme politique ivoirien qui en a fait son conseiller spécial, Franklin Nyamsi ne comprend rien à l’Afrique et au monde nouveau dans lequel il vit.
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