Le 25 mars 2004, la manifestation des militants du RDR et du PDCI, l’opposition politique d’alors, contre le gouvernement FPI se solda par un bain de sang. Selon le rapport des Nations Unies, au moins 120 personnes furent tuées durant la féroce répression menée contre les manifestants de l’opposition RDR et PDCI. Ces derniers furent brutalisés, gazés et mitraillés, par les forces de "sécurité" du gouvernement.(cf.rapport_onu_25_mars_2004).
Les dirigeants du FPI ne se sont jamais amendés de ce crime. Cette répression brutale et sanglante de la manifestation de l’opposition, interdite par le gouvernement FPI, le 25 Mars 2004, dans un Etat qui se disait démocratique, dénote une contradiction politique. La gouvernance du FPI qui s’autorise le droit de violer les droits de l’homme, fut émaillée de tueries et de massacres dont les dirigeants refusèrent d’assumer la responsabilité.
Ce bilan effrayant et cette attitude de dénégation, mettent en question la sincérité de la profession de foi démocratique affichée par les dirigeants du FPI. Elle met aussi en question leur aptitude à la pudeur, une vertu cardinale du politicien. Le philosophe Platon montre dans l’un de ses écrits, Le Protagoras, que la pudeur est la vertu politique cardinale du politicien. Elle permet de tempérer les passions primaires de l’être humain et de tempérer intérieurement le pouvoir. Selon Platon, le politicien dénué de pudeur est donc un fléau de la cité. Celle-ci doit s’en protéger car l’impudeur transforme le politicien en destructeur de cité.
Le massacre des manifestants de l’opposition PDCI et RDR, le 25 Mars 2004 par le pouvoir FPI, ne fit l’objet d’aucune enquête judiciaire intérieure. Il resta impuni. Et pour cause. Durant le gouvernement FPI, le pouvoir judiciaire et la cour constitutionnelle étaient sous la coupe totale de l’exécutif et de son chef. Sous le pouvoir FPI, durant dix ans, le droit d’exprimer librement des opinions dissidentes, de manifester librement et de s’opposer au gouvernement était puni de mort. Laurent et Simone Ggagbo, Abdou Dramane Sangaré, Mamadou Koulibaly et Affi N’guessan, les dirigeants du FPI, opposaient aux manifestations de l'opposition politique, non pas le dialogue politique mais la brutalité sanglante de la répression militaire et la mort. Ils récusaient au peuple le droit de choisir librement ses dirigeants et de les contrôler. Ils récusaient au peuple le droit de choisir librement ses dirigeants et de les contrôler. Après que le chef du FPI eut été élu « dans des conditions calamiteuses » selon ses propres termes, le FPI refusa ensuite au peuple ivoirien, le droit d’être le maître absolu de son existence politique en choisissant et en contrôlant ses dirigeants.
Le FPI a un problème avec l’élection démocratique qu’il récuse par principe idéologique. Son appel au boycott du référendum se situe dans la continuité de son appel au boycott de l’élection présidentielle d’Octobre 2015 et précédemment du refus des résultats de l’élection de Décembre 2010 qu’il ne se résolut à organiser qu’à contrecœur et sous la contrainte de la communauté internationale et de l’ONU.
L’ADN politique du FPI est structuré par le rapport de force et le viol des valeurs de la démocratie et de la République. La récupération de ces valeurs dans ses slogans politiques, est opportuniste et purement stratégique. Le droit de l’opposition à manifester librement contre le gouvernement, la limitation du pouvoir par les droits de l’homme, l’indépendance de la cour constitutionnelle sont des valeurs antithétiques à sa culture politique qui est, par essence, à la fois autocratique et insurrectionnelle. L’histoire de la gouvernance réelle du FPI, en lutte permanente contre des ennemis intérieurs et extérieurs, a montré que ce parti ne tolérait aucune opposition contre son pouvoir qu’il veut absolu et sans limitation. Elle a montré que sa culture autocratique du pouvoir l’amenait nécessairement à incorporer le judiciaire et le législatif comme bras armés de l’exécutif, à contrôler la société et à instrumentaliser ses communautés, corporations et associations.
Peut-on alors croire en la sincérité démocratique des acteurs de cette gouvernance calamiteuse dont ils ne reconnaissent d’ailleurs pas être les auteurs ? N’y-a-t-il pas une forme d’impudeur dérangeante et de cynisme dans cette dénégation des crimes perpétrés contre les droits de l’homme par des dirigeants politiques qui ne réclament le respect de ces droits, que de manière exclusive, pour eux-mêmes ? N’y-a-t-il pas une impudeur inquiétante dans cette aptitude surprenante à rejeter toute forme de responsabilité envers la cité quand on en a été les dirigeants politiques ?
A notre avis le gouvernement RHDP, devrait donc laisser le FPI s’empêtrer dans ses propres contradictions en l’autorisant à manifester sans entrave. Ayant déjà exercé le pouvoir, ce parti est comptable de ses errances qui battent en brèche l’image de la virginité dont il se pare dans une forme d’impudeur. Cette impudeur n’échappe pas aux ivoiriens qui n’ont pas la mémoire courte. Les inconséquences des dirigeants du FPI doivent, en conséquence, leur être opposées publiquement de manière discursive et non par une interdiction sécuritaire de manifester. La mémoire des ivoiriens est la garantie contre l’imposture politique évidente du FPI qui ne saurait se réclamer d’une virginité politique sur le registre de l’exemplarité démocratique et du respect des droits de l’homme.
La morale finale de cette histoire est que le discrédit de la classe politique est une menace mortelle contre la démocratie car elle sape, à la base, la confiance publique en érigeant l’imposture en culture politique nationale. Ce destin funeste possible de la démocratie, convoque impérativement les classes politiques ivoiriennes et africaines à se réapproprier les vertus de sincérité, de pudeur et de responsabilité pour sauvegarder la démocratie.
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